Les marchands du Temple, Giotto, XIV° siècle

 

7 mars

Chers frères et sœurs, 

Nous pourrions être choqués par le geste apparemment violent de Jésus, qui semble tellement aux antipodes de sa douceur dans sa parole et dans ses actes, notamment lorsqu’il refuse la violence lors de sa Passion : « Heureux les doux, ils obtiendront la Terre promise » (Mt 5,4). 

Alors comment comprendre ce geste de Jésus qui chasse les marchands du Temple avec un fouet ? Prendrons-nous Jésus en flagrant délit de contradiction ? Non, bien évidemment ! Ce geste n’a rien d’une colère non maîtrisée, c’est un geste réfléchi. Ce geste est un acte prophétique qui a un sens : Jésus veut nous dire quelque chose d’important comme toujours. 

Tout d’abord, les marchands présents dans le Temple avaient une utilité « religieuse », puisqu’ils permettaient au peuple qui montait prier Dieu de lui faire des offrandes, conformément aux rites du culte rendu à Dieu. Marie et Joseph eux-mêmes avaient sans doute acheté les deux tourterelles qu’ils ont offertes, lors de la présentation au Temple de Jésus (Lc 2,24). Donc en soi il n’y a rien de scandaleux dans la présence de ces marchands. 

Ce qui choque Jésus, et qu’il exprime dans ce geste, c’est la tristesse de son cœur : le risque est de faire du Temple un lieu de trafics, alors qu’il est pour Jésus, dans une expression pleine de tendresse, « la maison de mon Père » : Un lien mystérieux et profond unit Jésus au Temple de Jérusalem. Jésus est scandalisé par le manque de respect pour le Temple, lieu saint où réside du Père ; il révèle là, une fois de plus sa passion brûlante pour le Père : « l'amour de ta maison me dévore » (Jésus cite là le Psaume 68,10). 

 

Le risque des rites et des gestes de notre foi est toujours de croire « acheter » « une bonne conscience », en pensant qu’on achète la faveur de Dieu ; c’est un risque toujours présent dans notre vie spirituelle (je suis un bon chrétien parce que je peux cocher la case messe le dimanche, et la case prière, chaque jour…). 

Jésus explique ce geste que personne ne comprend, et qui a dû choquer terriblement parce qu’il semblait remettre en cause le culte de Dieu dans le Temple : « Détruisez ce Temple, en trois jours je le relèverai ». 

Vous imaginez quel choc ces paroles ont pu produire ; lorsque le Temple a été détruit par les troupes babyloniennes de Nabuchodonosor en 587 et le peuple envoyé en exil ce fut vécu comme un traumatisme terrible, un tsunami spirituel : Dieu aurait-il déserté son peuple ? Rappelons-nous notre émotion lors de l’incendie de Notre-Dame de Paris : on nous promet sa restauration en 5 ans, et Jésus la restauration du Temple en trois jours ! Jésus est-il devenu fou, telle devait être les pensées de ceux qui accompagnaient Jésus ce jour-là. 

Si Jésus est devenu fou, c’est au sens dont parle Saint Paul dans l’épître que nous méditons : 

« Ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes » (1 Co 1,25). 

Jésus, nous le savons, parle de sa mort et de sa résurrection. La bousculade du Temple parle de ce bouleversement inouï de la Passion de Jésus toute proche. 

L’Evangéliste Jean fait remarquer que c’est lors de la première Pâques de Jésus qu’il pose ce geste. Ce n’est pas par hasard : Jésus anticipe la Pâque du dernier repas (Jn 13). 

« En trois jours je le relèverai » : relever est le mot de la résurrection ; il s’agit bien donc de son corps qui sera méprisé, bafoué, exposé, maltraité et conduit à une mort infâmante sur la croix, le gibet des esclaves.  C’est le corps de Jésus ressuscité qui est le Temple nouveau, son corps qui rassemble les peuples dans l’amour du Père. 

La présence de Dieu dans l'humanité du Christ, parle aussi de sa présence en tout homme qui est « Temple de l'Esprit », sa présence dans la communauté chrétienne. « Si quelqu'un m'aime, nous viendrons en lui, et nous ferons en lui notre Demeure » (Jn 14,23) Quelle grandeur, quelle dignité pour l'homme !

6mars

Chers frères et sœurs, 

Le pardon, encore et toujours plus grand, plus émouvant ! Jésus nous invite à l’émerveillement devant « le Père prodigue d’amour » (Paul Claudel). 

C’est un diamant évangélique pur qui brille de mille feux, du feu de l’amour et du pardon infinis de Dieu. Contemplons un instant cette merveille de l’inventivité de l’amour de Dieu. 

La parabole opère un passage intérieur chez ce fils dit « prodigue » : un départ et un retour, un chemin qui le fait passer de l’esclavage d’une illusion d’indépendance et de liberté, à la vraie liberté de fils aimé du Père. 

- Un départ, une déchéance progressive qui conduit ce fils très bas, un départ pour trouver une liberté rêvée ; en fait ce sera le constat d’une vie de gâchis de l’héritage paternel, une vie gâchée, d’une vie rabaissée à garder les porcs, animaux impurs… Etre gardien des porcs est signe d’une aliénation extrême, le fils qui se croyait libre est devenu esclave. Une errance qui conduit au malheur. 

- Un retour sur soi. « Il rentre en lui-même » (Lc 15,17). Une honte assumée : « je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ».  

Un retour la tête basse à la maison paternelle. « Il se lève » (un des mots de la résurrection), la vie va reprendre ses droits. 

- Une surprise, immense, le Père sur le seuil veille, confiant, il attend son retour, patiemment ; il est « ému aux entrailles », son cœur se retourne de tendresse pour ce fils qui revient la tête basse : il accourt vers lui, le prend dans ses bras, l’embrasse.  

Le Père qui le comble au-delà de ses espérances. 

Des gestes qui remettent debout le fils perdu, et lui relèvent la tête : Il est revêtu du « plus beau vêtement », celui de fils. On lui donne une bague, signe de l’autorité, signe d’une alliance renouée, des sandales, signes d’une vraie liberté retrouvée, on tue et prépare le veau gras des jours de fête. Un repas de fête qui dit une joie commune. 

Et surtout une dignité retrouvée ; le fils perdu s’est retrouvé fils aimé du Père, pardonné sans condition. Plus vivant et plus libre qu’il n’a jamais été dans sa fausse liberté ! 

Une joie partagée avec son Père. « Réjouissez-vous avec moi » (Lc 15,6). 

La logique de Dieu n’est pas celle des hommes : elle est gratuité, pardon sans condition, miséricorde, « une mesure pleine, tassée, secouée, débordante »

5mars

Chers frères et sœurs, 

Elle est magnifique l’histoire de Joseph, le fils de Jacob, qui est comme une préfiguration de l’autre Joseph, et comme une annonce du pardon du Christ. Le récit de Joseph dans le livre de la Genèse est très riche de sens en cette année Saint-Joseph : tous les deux sont des hommes aux songes. Ces songes sont un don de Dieu et ils disent la présence de Dieu dans la Bible. 

Joseph est l’enfant préféré de Jacob ; celui-ci lui donne une tunique de grand prix , « de toutes les couleurs », vêtement de l’héritier, signe de la protection de Dieu, et symbole de sa mission d’accomplir la volonté de Dieu qui lui est confiée, celle du pardon ; loin d’éveiller l’action de grâce pour les dons dont Dieu colore leur frère, cette faveur excite la jalousie de ses frères ; ils le prennent en grippe et le haïssent ; d’autant plus que celui-ci leur raconte ses songes avec une certaine naïveté ; il leur annonce que son père et ses frères se prosterneront un jour devant lui. Bien mal lui en prit de leur avoir raconté cela ! Ses frères jaloux complotent alors contre lui pour le faire mourir. 

Ils le jettent dans un puits pour le tuer, après l’avoir dépouillé de sa tunique (tiens, cela ne nous rappelle-t-il pas la tunique de la Passion ?) ; finalement sur l’intercession du plus âgé des frères, ils le vendent à des caravaniers qui passent pour en tirer un profit financier (comme Jésus sera vendu par un des siens). Pour justifier sa disparition, ils montrent à leur père sa tunique trempée dans le sang d’un bouc, en racontant que Joseph a été dévoré par un fauve. 

Joseph en Egypte deviendra ministre de pharaon, après lui avoir expliqué ses rêves. Joseph va alors faire des réserves de grain pour faire face à la disette qu’il a déchiffrée dans les songes de pharaon ; les frères de Joseph qui connaissent aussi la famine, vont en Egypte et se prosternent devant Joseph sans le reconnaître (ainsi s’accomplit le songe de Joseph qui lui a valu tous ses déboires). Ils l’implorent de leur donner de quoi survivre. Joseph donne libre cours à son émotion lorsqu’il retrouve ses frères qui l’ont trahi et vendu (Gn 42,2). 

Joseph prend alors un des frères en otage, jusqu’à ce qu’ils lui amènent le plus jeune Benjamin. Après d’autres péripéties, Joseph est pris d’émotion et il éclate en sanglot tellement forts que « les Égyptiens l’entendirent, et même la maison de Pharaon » (Gn 45,2.). Joseph se fait alors reconnaître des ses frères. 

Belles larmes qui disent le pardon ; Joseph pleure le mal qu’il a fait à ses frères et pardonne le mal que ses frères lui ont fait. Joseph se livre à une relecture des événements à la lumière de la foi. Joseph n’a pas été livré par ses frères, mais a été envoyé par Dieu : « Ce n’est pas vous qui m’avez envoyé ici, mais Dieu » (Gn 45,8). 

Ce récit est une tragédie, mais Dieu change celle-ci en bénédiction : du mal, Dieu peut faire sortir un bien plus grand : « Vous aviez voulu me faire du mal, Dieu a voulu le changer en bien », dira Joseph à ses frères (Gn 50,20). Sans Joseph les descendants d’Abraham seraient morts de faim. Mystère du mal humain que Dieu convertit en bien. Joseph est né pour être frère et c’est lui qui a rassemblé sa famille divisée par la haine. 

Bien sûr Joseph est préfiguration de Jésus-Christ, le fils bien-aimé du Père venu nous transmettre l’amour et le pardon de son Père. Comme Joseph a reconstruit sa famille dans l’amour retrouvé, Jésus rassemblera « dans l’unité les enfants de Dieu dispersés (Jn 11,52).

4 mars

Chers frères et sœurs, 

Nous relisons en ce jour la parabole de l’homme riche et du pauvre Lazare (Lc 16-19-31). N’oublions pas que c’est une parabole ; donc tout n’est pas à prendre au « pied de la lettre » … Celle-ci met en scène un pauvre nommé Lazare, dont le nom signifie : « Dieu aide » (c’est tout un programme), et un homme riche dont on a oublié le nom, comme si sa richesse le caractérisait en entier et absorbait toute son identité. Ce n’est en général pas bon signe, comme le fait remarquer le pape François, lorsqu’on donne un surnom à quelqu’un, au point d’en oublier son nom : le « riche », « le petit », le « traître » … 

L’Evangéliste Luc met en valeur le contraste entre les deux personnages de cette parabole : la richesse extravagante de l’un qui lui ouvre tous les possibles : des vêtements de luxe, des fêtes incessantes… : « Un homme riche, vêtu de pourpre et de lin fin, faisait chaque jour des festins somptueux » (Lc 16,19) ; et la situation pitoyable de l’autre, un pauvre tapi à la porte du riche : celui-ci est non seulement affamé, mais couvert de plaies léchées par les chiens qui sont des animaux impurs. Il est dans une situation désespérée, incapable de se lever, comme échoué définitivement devant la porte du riche qui l’ignore avec mépris. 

La parabole laisse aussi supposer que cet homme riche était un homme de foi, qui avait étudié la Torah, puisqu’on le voit dialoguer avec Abraham. 

Et voilà bien ce que dénonce la parabole, la foi qui ne s’inscrit pas dans les actes…Le pape François décrit le riche comme un homme enfermé dans « une bulle de vanité », enfermé dans un petit monde d’égoïsme, ne pensant qu’à son petit bonheur de fêtard, incapable de se tourner vers les autres et de voir la misère, la souffrance à sa porte. Oui, sa richesse l’a rendu complètement aveugle et a asséché sa foi qui n’est plus pour lui une source d’eau vive. Sa vie restait comme en superficie, mais aride en vérité, loin de l’amour. 

Sa porte et son cœur restaient fermés. Au fond, c’est comme le fait de s’étourdir dans ses richesses le rendait aveugle, malgré sa foi. Il n’a pas su voir le Seigneur qui frappait à sa porte dans la personne souffrante de Lazare. 

Le riche se ferme à la miséricorde envers le pauvre qui gît à sa porte et se condamne lui-même à être exclu de la miséricorde. Un abîme le séparait de son frère pauvre. 

Une des leçons de la parabole est de nous rappeler que toute relation est porteuse d’éternité, elle nous met face à notre Seigneur : « J’étais malade, nu, pauvre, et vous êtes venus me visiter » (Mt 25) 

Quand l’un et l’autre meurt il se produit comme un renversement des destins : Lazare est à la fête et le riche dans un abîme de souffrances. Le plus malheureux des deux n’était pas celui que l’on pensait ! Refusant la rencontre, le riche était déjà mort spirituellement sans le savoir. Ce riche était pauvre d’oublier qu’il avait un frère à sa porte. 

Les pères de l'Eglise ont vu se profiler Jésus derrière le pauvre Lazare : comme Lazare est rejeté à la porte du riche, Jésus meurt rejeté à la porte de Jérusalem. 

Le riche est renvoyé à la Parole de Dieu qui ne cesse d'inviter au partage des biens pour en faire une source d'amitié. Jésus appelle les riches que nous sommes à la responsabilité pour nos frères pauvres ; matériellement, mais aussi spirituellement ; Nous avons le trésor : la richesse du Christ, de sa Parole ; que faisons-nous de ce trésor ? Le partageons nous avec nos frères ? 

Dans le partage, l’attention aux petits et aux pauvres, c’est la communion des hommes entre eux et avec Dieu qui est en jeu. 

Que Lazare nous aide à vivre toute rencontre de l’autre, quel qu’il soit, comme un don.

Mercredi 3 mars

La demande des Fils de Zébédée nous rapproche du mystère du jeudi Saint. 

Jésus vient d’annoncer pour la troisième fois sa Passion. Ce qui suscite une demande qui nous semble bien déplacée… 

Jacques et Jean, les fils de Zébédée, sont surnommés « les fils du tonnerre », en raison sans doute de leur caractère entier et de leur fougue, eux qui ne reculent pas devant la tentation de la violence contre ceux qui refusent de croire en Jésus (Lc 9,54). Curieusement dans l’Evangile de Mathieu, c’est leur mère qui fait la demande pour eux (cela me rappelle immanquablement les mamans qui viennent demander pour leur fils comment se préparer au mariage !). Cela pourrait apparaître comme une ambition naïve, mais pas seulement : Le désir d’être proche du Seigneur dans son Royaume est bon en soi ; il est beau de vouloir être toujours au plus près du Christ ! C’est pour cela qu’ils ont tout quitté pour suivre Jésus ; mais Jésus leur rappelle qu’il y a une condition rude, celle de « boire à sa coupe », c’est-à-dire de le suivre dans sa Passion, de partager sa souffrance ; Jacques et Jean répondent avec une belle spontanéité et une belle générosité : « Nous pouvons boire la même coupe que toi ». Jésus leur répond qu’il faut laisser au Père le soin de préparer ces places dans le secret de sa liberté. 

Ensuite s’élève un tollé de la part des dix autres disciples qui s’indignent, sans doute par jalousie ; si Jacques et Jean ont les meilleures places, que leur restera-t-il ? Jésus leur livre alors l’exigence le plus belle et la plus grande du Royaume : « Le plus grand parmi vous sera votre serviteur » (Mt 23,11). A chaque fois que les disciples cherchent à savoir qui parmi eux est le plus grand, Jésus les renvoie à la seule grandeur celle du service humble du Seigneur et du frère : « Quel est en effet le plus grand : celui qui est à table, ou celui qui sert ? N’est-ce pas celui qui est à table ? Eh bien moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert » (Lc 22,27).  

En fait, Jésus leur rappelle  que la condition première de l’évangélisation est celle-ci : ce que nous proposons aux autres, nous devons être le premier à le pratiquer. Ce que demande Jésus a la force d’une expérience vécue, qu’il veut nous partager, et qu’il nous invite à vivre : Jésus est LE Serviteur, lui qui se met en tenue de service, ce qu’exprimera dans toute sa force le lavement des pieds du jeudi Saint : Jésus est bien « venu pour servir et donner sa vie ». 

Donne-nous Seigneur la grâce de servir comme toi !

Mardi 2 mars

Chers frères et sœurs, 

« Ils disent et ne font pas » (Mt 23,3). 

Ce reproche adressé par Jésus aux pharisiens, pourrait souvent nous être adressé. Que celui qui n’a jamais dit qu’il allait faire quelque chose, qui attend toujours sa réalisation, me jette la première pierre (par mail ce sera moins douloureux !). Or la vérité d’un enseignement se mesure à l’authenticité d’une vie, à la façon dont cet enseignement est vécu par celui qui l’enseigne : « les faux prophètes qui viennent déguisés en brebis, alors qu’au-dedans ce sont des loups voraces » (Mt 7,16). 

Ce que Jésus leur reproche c’est d’abord et avant tout leur hypocrisie (ils ont un masque - pour d'autres raisons que nous- et jouent un rôle, verset 13), leur vantardise, et leur recherche puérile d’honneurs et de succès. Il y a écart dans leur vie entre dire et faire, entre paraître et être. 

Jésus par sa vie bouleverse toutes les hiérarchies sociales, familiales, religieuses. Des « titres » on ne peut plus communs : « Père » ou « Maître » sont à utiliser avec prudence ; Jésus les a en partie vidés de leur sens : Jésus est le seul Rabbi, le seul « Maître », et son Père, le vrai Père. Et par conséquent toute distinction de rang ou de dignité est superflue, elle est un contre-sens par rapport à notre vraie condition de fils de Dieu ; une seule réalité subsiste, la plus belle la plus grande, celle de frères les uns pour les autres : « Vous êtes tous frères » (Mt 23,9). 

Et plus encore, Jésus rappelle que tout pouvoir, toute autorité, toute hiérarchie est service. Si Jésus est « Rabbi » et « Maître », c’est parce qu’il s’est fait serviteur. « Je suis parmi vous comme celui qui sert » (Lc 22,26-27 : « Que le plus grand d’entre vous devienne comme le plus jeune, et le chef, comme celui qui sert. Quel est en effet le plus grand : celui qui est à table, ou celui qui sert ? N’est-ce pas celui qui est à table ? Eh bien moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert »). Dans le royaume de Dieu, tout est comme inversé : C’est le plus petit qui est le plus grand, c’est le plus pauvre qui est « bienheureux » …

« Jésus a tellement pris la dernière place, que personne n’a pu la lui ravir » (Bx Charles de Foucauld). 

Seul vaut le service humble et fraternel. 

Seigneur fais nous grandir par notre sens du service de nos frères !

Lundi 1er mars

Chers frères et sœurs, 

Attention, encore des perles évangéliques à contempler inlassablement et sans modération ! 

« Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. » 

« Donnez, et l’on vous donnera : une mesure bien pleine, tassée, secouée, débordante… » 

Quelle incroyable Parole : « Soyez comme votre Père des cieux ». La barre est placée très haute ! Jésus s’efface au point de ne pas se donner lui-même en modèle, cela donne à méditer sur l’humilité du Christ. 

Dans l’Evangile de Luc, ce qui est à imiter en Dieu est sa « miséricorde » (chez St Matthieu nous entendions samedi dernier : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait », cela nous parle peut-être moins). Dans la Bible Dieu est « touché », « ému aux entrailles » (« pris aux tripes », dirait un certain langage populaire plus imagé encore) devant la souffrance des hommes. Autrement dit, c’est une invitation à se laisser toucher par nos frères qui souffrent ou peinent sur leur chemin. 

« La charité est don. Elle donne sens à notre vie. Grâce à elle, nous considérons celui qui est dans le manque comme un membre de notre propre famille, comme un ami, comme un frère. Le peu, quand il est partagé avec amour, ne s’épuise jamais mais devient une réserve de vie et de bonheur » (Pape François, message de carême 2021). 

Le don de nous-mêmes nous fait entrer dans la manière d’être de Dieu qui est don ; et nos relations avec notre prochain sont le lieu où grandit notre relation à Dieu. 

L'amour de Dieu est « un amour sans mesures, sans nos mesures », comme le dit Madeleine Delbrel.  

« Pardonnez… donnez » : c’est ainsi que nous pouvons ouvrir les portes aux merveilles du don gratuit. « Il vous sera donné en plus » (Mc 4,24) : merveille de l’amour de Dieu qui ne compte pas, qui est générosité toujours débordante. C’est à cela que nous sommes invités à ressembler !  

« Cherchez le Royaume, et tout cela vous sera donné en plus » (Lc 12,31). L’amour de Dieu sera toujours plus, jamais trop ! La meilleure image que nous en donne Jésus est le Père Prodigue, dans la parabole dite du Fils prodigue (Lc 15). 

 

Père Etienne Maroteaux,
Curé de Sainte-Marguerite et Sainte-Pauline du Vésinet